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Par éditionslavagueverte le 4 Août 2023 à 07:00
Les dames ont relevé leurs jupes.
Quand le passeur dit le « passager du Crotoy » a gagné l’autre rive, on s’engage sur le sable, grenu comme une peau de chagrin, mais moins sec que celui du Sahara. Les personnes prudentes vous conseilleront de prendre un guide, qui ne saurait, après tout, que porter vos paquets et vous conduire en ligne droite.
Les dames, nos compagnes de route bien avisées, ont relevé leurs jupes jusqu’à mi-jambe à l’instar des pêcheuses du pays et ne craignent pas de montrer leurs mollets. Honni soit qui mal y pense ! Elles tiennent leurs bottines à la main, ce qui ne laisse pas de les embarrasser, car elles se sont munies aussi des filets et petits engins nécessaires à la pêche.
Mauvais début, la marche n’est pas si aisée que nous le disaient les bonnes gens du Crotoy. Le sol est solide, mais souvent parsemé de débris de coquillages pulvérisés. Le sable devient parfois mouvant et s’enfonce, par endroits, sous les pieds qu’il faut se garder de trop appuyer. Nous courons, nous sautons pour éviter des « baches » d’eau peu profondes où les mollusques broutent sur de petites algues. Et ce sont de petits cris de nos compagnes effarouchées, de fausses alertes : « Gare au flot ! La mer monte ! »
Mais bientôt on a repris son équilibre, on s’est convaincu de l’inanité du danger. Un beau soleil dore la baie et miroite sur les flaques d’eau de la vaste esplanade. C’est un plaisir de plonger les pieds dans l’eau l’eau des petites mares. Cela procure comme une tiède caresse. On respire l’air salin, on savoure la joie de vivre, la volupté de ne penser à rien.
Dans la petite caravane, en marche vers Saint-Valery, l’un porte ses souliers et ses chaussettes attachés au bout de sa canne ; un autre, simplement chaussé Saint-Valery-sur-Somme, l’Avenue de la République et la Rue Jean Acloque d’espadrilles, a laissé à l’hôtel ses chaussures incommodes. Une dame provoque de légers sourires, avec des jupes flottantes qui se ballonnent au moindre vent et qu’elle s’évertue soit à rabattre, soit à attacher au moyen d’épingles.
Tous ces touristes, trop parisiens, comptent prendre une part active à la pêche qui va s’organiser et qui sera l’accompagnement de cette promenade, où le plaisir de traverser cette immense étendue de sable se double d’un divertissement hygiénique, à la portée des gens du monde. Et le cadre est approprié au tableau.
par Paul Eudel
Extraits de :
LA CÔTE PICARDE À LA BELLE ÉPOQUE
Collectif
15.8 x 24 cm - 132 pages avec plans, cartes postales anciennesPour en savoir plus sur ce livre...
LE CROTOY À LA BELLE ÉPOQUE
Paul Eudel
14.5 x 21 cm - 110 pages avec cartes postales et illustrations
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Par éditionslavagueverte le 28 Juillet 2023 à 07:00
Saint-Quentin (Augusta Veromanduorum, Quintinopolis), à 50 kilom. nord-ouest de Laon, chef-lieu d’arrondissement, peuplé de 24 953 habitants, siège d’une chambre consultative des arts et manufactures, d’un conseil de prud’hommes, d’une société académique des arts, sciences et agriculture, de tribunaux de première instance et de commerce, avec collège communal et école de commerce ; était autrefois chef-lieu d’élection, bailliage, prévôté royale, maîtrise particulière, gouvernement particulier, capitale de la petite province de Vermandois relevant du diocèse de Noyon, du parlement de Paris et de l’intendance d’Amiens.
La très ancienne origine de cette ville est attestée par les documents les plus authentiques, elle est citée par Ptolémée, elle figure dans l’itinéraire d’Antonin et dans la table de Peutinger ; elle échangea son nom romain en l’honneur de saint Quentin, un des premiers apôtres du christianisme, qui souffrit le martyre dans ses murs en 303, dans la persécution qui ensanglanta le règne de Dioclétien et de Maximien ; elle n’échappa à aucune des crises qui signalèrent la dissolution de l’empire ; prise et brûlée par les Vandales en 407, par Attila en 451, elle fut ravagée plus cruellement encore par les Normands au VIIe siècle et en 883. Elle ne retrouva de sécurité que sous le règne de Charlemagne, qui avait une profonde vénération pour la sainteté de son église et qui l’enrichit de ses libéralités. Les guerres féodales troublèrent vite cette ère de paix et de prospérité. Hugues de France s’empara de Saint-Quentin en 932, après un siège de deux mois. L’ancien possesseur, Herbert II, appela les Lorrains à son aide et reprit la ville, dont les fortifications furent détruites. Vers 1102, une charte communale fut octroyée aux habitants de Saint-Quentin par Raoul, comte de Vermandois ; Philippe le Long l’abolit sans qu’on en connaisse les motifs ; Philippe le Bel la rétablit, en 1322, à la promesse faite par le peuple de relever à ses frais les fortifications. Livré comme un enjeu permanent à toutes les chances de la guerre dans les démêlés des rois de France avec les ducs de Bourgogne, l’Espagne et la maison d’Autriche, Saint-Quentin supporta les désastreuses conséquences de la mémorable bataille dite de saint-Quentin, après laquelle la ville investie par une armée de 100 000 combattants fut obligée de succomber au bout de vingt et un jours de tranchée ouverte. Telle fut la mortalité pendant le siège et la terreur des survivants, que pas un seul habitant ne resta dans la ville. Saint-Quentin ne fut rendu à la France que par le traité de Cateau-Cambrésis le 16 décembre 1559. Peu à peu la ville se repeupla, les ruines se relevèrent, et l’industrie vint cicatriser les plaies de la guerre ; la création des premières fabriques de linon, l’introduction de la culture du lin, dues à Crommelin, datent de 1579. Depuis lors, rien n’est venu arrêter l’essor qu’a pris le génie industriel de cette contrée ; la filature et le tissage occupent un nombre immense de bras dans la ville et les campagnes environnantes ; quoique le coton ne soit employé généralement que comme mélange dans la confection de ses tissus, Saint-Quentin absorbe la quarantième partie des importations que reçoit la France. Le goût et le bon marché des produits, une activité infatigable, une certaine audace dans les spéculations, ont fait de Saint-Quentin un des centres commerciaux les plus importants de toute la France.
La Ville, située au sommet et sur le penchant d’une colline au bas de laquelle coule la Somme, est entourée à l’est par le canal de Picardie comme d’une demi-ceinture plantée de beaux arbres qui forment une promenade charmante ; les rues principales sont larges et bien percées, presque au centre s’étend une vaste et belle place à laquelle aboutissent les trois grandes voies qui donnent accès dans la ville. Les monuments les plus remarquables sont : l’hôtel de ville, d’un style gothique, surchargé d’ornements bizarres, la cathédrale, qui rachète l’absence de ses tours par une grande pureté de lignes à l’intérieur, l’église Saint-Jacques, l’hôtel-Dieu, les hospices, la bibliothèque, riche de 14 000 volumes, le jardin de l’Arquebuse, la salle de spectacle, le beffroi et le palais le justice.
Saint-Quentin a vu naître le savant Condorcet et l’utopiste Babeut.
Les armes de la ville sont : d’azur, ou bien, de gueules, à un buste de saint Quentin d’argent accompagné de trois fleurs de lis d’or, deux en chef et une en pointe.
par Victor Adolphe Malte-Brun
Extrait de :
LES HAUTS DE FRANCE AU XIXe SIÈCLEFrancis Wey et Adolphe Malte-Brun15.8 x 24 cm - 200 pages - Illustrations, cartes postales anciennes, plans...
Pour en savoir plus sur ce livre...
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Par éditionslavagueverte le 21 Juillet 2023 à 07:00
Cayeux est une étrange bourgade. Jusqu’à ces dernières années, c’était un pauvre village de pêcheurs et de serruriers, dont les misérables maisons de torchis et de galets s’éparpillaient sans ordre derrière le cordon littoral de galets, sur les bourrelets successifs qui ont amené les atterrissements d’une grande partie de la baie de Somme. La mode des bains de mer est venue, et voilà Cayeux bordant ses rues irrégulières de maisons meublées, de villas modestes et d’hôtels. Le tout dans un site qui serait lugubre si la mer n’était pas là : tantôt au large d’immenses plages de sable, tantôt battant la base du bourrelet de galets et amenant sans cesse de nouveaux cailloux arrachés aux falaises normandes. Cette juxtaposition de maisons balnéaires et de chaumières a enlevé à Cayeux l’aspect de sauvagerie de jadis, cause d’un dicton picard :
« Qui a vu Paris doit voir Cayeux ».
par Ardouin-Dumazet, extrait de Voyage en France, Basse- Picardie
Bien qu’étant surtout une plage de famille, Cayeux n’en possède pas moins depuis quelques années un très beau Casino municipal, situé au centre de la plage et faisant face à la mer par un grand perron d’accès et de vastes baies vitrées. On y trouve toutes les attractions des casinos des grandes plages : salles de jeux, café, orchestres symphoniques, salles de bals et de concerts, troupe théâtrale permanente. La partie théâtrale est particulièrement soignée, grâce à la compétence du propriétaire du Casino, qui est directeur du théâtre du Château-d’Eau, à Paris, et organisateur d’un grand nombre de tournées théâtrales.
Il y avait, il y a deux ans, un Kursaal avec troupes de café-concert, mais cet établissement, situé en bordure de mer, a été acquis par le propriétaire du Casino, qui l’a transformé en hôtel moderne.
Deux salles de bal ont remplacé les célèbres établissements d’autrefois, mais ont émigré vers les nouveaux quartiers. Ce sont les bals du « Café de l’Univers » et du « Café Parisien », situés dans l’avenue de la Gare, très fréquentés tous deux par la jeunesse cayolaise. Les spectacles et concerts qui y sont donnés à l’occasion des fêtes, par les musiciens et les jeunes gens du pays, sont très suivis par la population et même à l’occasion par les étrangers.
par Charles Galbruner
Extrait de :
CAYEUX-SUR-MER À LA BELLE ÉPOQUE
Charles Galbruner
14.5 x 21 cm - 86 pages avec cahier-photos
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Par éditionslavagueverte le 15 Juillet 2023 à 14:48Les Editions la Vague verte participeront les samedi 22 et dimanche 23 juillet à la fête Terre de Verre en Ribouldingue au Manoir de Fontaine à Blangy sur Bresle (76).Expo-vente de livres : Histoire & Terroirs, Histoire & Nature...Au plaisir de vous y retrouver !
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Par éditionslavagueverte le 14 Juillet 2023 à 07:00
Alors que la Bastille est prise à Paris le 14 juillet 1789 et qu’un grand nombre de villes sont le théâtre d’événements tragiques, dans notre cité on espère un triomphe certes difficile mais aussi pacifique de la Révolution. Lucides et courageux, les Abbevillois ne souhaitent absolument pas le renouvellement de débordements et désordres de toutes natures ; ils en ont trop connus au cours de leur longue histoire. Par un décret du 15 janvier 1790, la nouvelle assemblée changea les nouvelles circonscriptions administratives du royaume et divisa les anciennes provinces en départements. Ainsi, Abbeville, 2e ville du département de la Somme, devenait le chef-lieu d’un district (maintenant arrondissement).
Un an après la prise de la Bastille parisienne, on célébra à Abbeville sur le Champ de Mars la Fête de la Fédération. Ce fut l’occasion de planter un arbre de la Liberté. Des discours furent prononcés par le maire Dubellay et le procureur de la commune. L’arbre, de haute taille, symbole de la liberté, peint de trois bandes aux couleurs nationales fut dressé aux applaudissements unanimes des spectateurs et aux sons d’une musique militaire. La journée se termina par des danses. Plus tard, le 10 décembre 1793, fut planté avec solennité, sur la place St Pierre, l’arbre de l’Egalité et de la Liberté. Un second arbre fut planté en face du temple de la Vérité et de la Raison (collégiale St Vulfran).
C’est aussi en 1790, année de la fête de la Fédération, qu’on ordonna de supprimer les ordres religieux, de vendre les couvents et de détruire les églises. Quelques prêtres furent hostiles au serment de fidélité à la Constitution civile du Clergé qui leur était imposée, ce qui provoqua divers troubles en 1791, aggravés par la disette et la misère. En grande majorité, les Abbevillois souhaitent le rétablissement de Louis XVI sur le trône et l’apprécient encore, malgré sa fuite vers les troupes étrangères royalistes de l’Est et son arrestation à Varennes le 20 juin 1791. La même année, ils déplorent aussi la mort de Mirabeau, le célèbre orateur-député du Tiers-Etat, partisan d’une monarchie constitutionnelle, pour qui la garde civique devenue garde nationale fait célébrer un service à St Vulfran, avant la fermeture des églises en juin 1791.
Mais la Patrie en danger se mobilise contre la guerre étrangère (Autriche et Prusse). Des bataillons de volontaires sont formés rapidement. Les jeunes Abbevillois font partie du premier, affectés d’abord à l’armée de Belgique, puis à l’armée du Nord. Ces jeunes recrues sont engagées à la frontière et se font bientôt remarquer par leur héroïsme. Le deuxième bataillon trouve la gloire au combat d’Orchies, dans la nuit du 14 au 15 juillet 1792, contre des forces très supérieures. Une délégation de volontaires abbevillois participe à la décisive bataille de Valmy le 20 septembre 1792, au lendemain de laquelle fut proclamée la 1re République française. Parmi les volontaires de 1791, citons Virgile Delegorge, d’une famille abbevilloise bien connue. Il sert d’abord dans le 1er bataillon de la Somme, en qualité de lieutenant, à partir du 28 août 1791. Il fera ensuite plusieurs campagnes, comme officier au 7e régiment de cavalerie, et reviendra dans sa ville natale, après avoir passé 6 ans dans les armées républicaines. Commandant de la Garde nationale au début de la Monarchie de Juillet (Louis-Philippe), il meurt en 1846.
Extrait de :
HISTOIRE D’ABBEVILLE et de sa régiondes origines à l’aube du XXIesiècleGérard Devismes
14 x 21 cm - 264 pages
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