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    Enlèvement et vengeance en 1437

    La Hire, prisonnier au château d'Albert

    Portrait imaginé d'Etienne de Vignolles dit La Hire par Louis-Félix Amiel, 1835

     

    Étienne de Vignoles (né vers 1390 et mort le 11 janvier 1443 à Montauban), dit La Hire, est un homme de guerre français, qui était compagnon d'armes de Jeanne d'Arc.

    Monstrelet raconte sur Guy de Nesle, père de Jean, une anecdote assez singulière, où figure le célèbre aventurier gascon si connu sous le nom de La Hire.

    En 1434, La Hire, avec une troupe de 200 hommes, passait devant le château de Clermont en Beauvaisis où commandait Guy de Nesle. Ce dernier, voulant lui faire accueil, fait apporter du vin devant la poterne du château, régale la troupe et cause avec La Hire, qui tout à coup, traîtreusement, s’empare de lui, l’emmène prisonnier, et le tient un mois enfermé, « moult durement et en grand travail, tant qu’il eut le corps et les membres moult travaillés et fu plain de poux et de vermine. » Il fallut que Guy de Nesle, pour obtenir sa liberté, payât rançon de « 14 000 salus d’or, ung cheval de pris et vingt queues (barriques) de vin. » C’est ainsi qu’on en usait alors entre capitaines qui étaient tous deux au service du roi de France.

    Guy de Nesle, qui gardait à la Hire une rancune, bien légitime assurément, trouva, quelques années plus tard, en 1437, moyen de se venger. A la tête de 120 hommes il entra tout à coup dans Beauvais, où commandait la Hire, alla droit à l’Hôtellerie St Martin, où il savait que la Hire était en train de jouer à la paume, s’empara de lui, et l’emmena lestement ; poursuivi, mais inutilement, par quelques soldats et bourgeois. La Hire fut conduit prisonnier au château d’Encre, et sans doute soumis au même régime qu’il avait infligé à Guy de Nesle. Le roi intervint en faveur du captif, écrivit au duc de Bourgogne, devenu comme on l’a dit, par le traité de 1435, le suzerain de la châtellenie d’Encre. L’affaire fut discutée au conseil du duc, assemblé à Douai, qui trouva que « la prise n’estoit belle ni bonne, ne honnest. » Le duc de Bourgogne d’ailleurs tenait alors à « complaire au roy. » La Hire fut rendu à la liberté, au grand dépit de Guy de Nesle, qui dut se contenter « d’aulcunes (quelques) récompensacions pour ses intérestz, non mie à comparer à la finance qu’il avoit paiée. »

     

    Extrait de : 

    Villes & Villages  ALBERT
      Histoire et description de la cité d'Encre
     
      Henri Daussy 
     
      Edition recomposée, revue et augmentée :
       Plans, portraits et reproductions de cartes postales anciennes
      15 x 21 cm - 272 pages

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    Au jardin du père Labêche : La Pie

    Eugène Noël est décédé en 1899 à Bois-Guillaume.

    En 1905, son buste fut inauguré dans le jardin des Plantes de Rouen.

     

    Un lecteur m’invite, ayant parlé du geai, à parler maintenant de la pie. Je m’en garderai bien.

    La pie est un oiseau de tant d’esprit et d’un esprit si rusé, si vif, si intrigant, si gouailleur, elle est d’ailleurs de sa personne si remuante, si brusque d’allure, de vol, de marche, qu’on ne saurait un instant l’observer en repos. J’ai parlé de marche ; mais elle ne marche pas, elle saute. Et comment saute-t-elle ? est-ce en avant ? est-ce en arrière ? en vérité, l’on n’en sait rien, tant elle saute de travers. Tout en ses mouvements est à la fois oblique et comique. Occupée à tout parodier, et ce qu’elle entend et ce qu’elle voit, on dirait parfois qu’elle se parodie elle-même et qu’elle joue à la caricature.

    Dans ses actions les plus sérieuses (s’il y a du sérieux pour la pie) elle entremêle la feinte, le jeu, la farce. Sa passion, c’est le dérisoire.

    Les voici, par exemple, au printemps, mâle et femelle, très régulièrement mariés. Ensemble vous les voyez s’empresser de bâtir un nid superbe : ils vont, ils viennent, transportent de longues branches, cognent, charpentent, menuisent, maçonnent à grand bruit. Le bec ne leur clôt, la femelle ne cesse de parler au mâle, qui toute la journée répond à la femelle, et le nid, au sommet du plus bel arbre, prend des proportions gigantesques. Eh bien ? ce nid est un faux nid, c’est une farce à l’enfant ou même au chasseur qui les guette. Le véritable nid se fera dès l’aube, avec mystère, en un lieu caché, si haut, sur une branche si faible, que l’enfant le plus léger, le plus adroit ne l’atteindra qu’au péril de sa vie. Combien s’en est-il tué de jeunes dénicheurs de pies ! C’était dans nos anciens villages, en la saison des nids, une histoire de tous les jours et que partout vous entendiez raconter. Je lis dans une vieille comédie :

    « Ce pauvre dièble était allé dénicher des pies sur l’orme de la commère Massée. Dame, comme il était au coupiau, le v’la, bredi, breda, qui commence à griller tout à vau les branches et cheit une grande escousse, pouf ! à la renvarse... diable sait de la pie et des piaux ! »

    Soyez sûr qu’au pouf du malheureux gars qui en tombant « s’escrabouillit la cervelle » vous eussiez entendu dans le nid le père et la mère pies et les piaux crier en riant l’aventure à toutes les autres pies.

    — Ah ! tu voulais, bambin, nous prendre nos petits ! te voilà mort, c’est bien fait !

    Et toute une semaine en retentira la Gazette des pies. La Gazette des pies. Ce sont les pies elles-mêmes, les entendezvous redire à milliers d’exemplaires l’aventure ? Ne pensez pas néanmoins que dans le peuple pie, personne s’avisera jamais de prononcer à propos de cet événement les grands mots de justice, de crime ou de châtiment ; non c’est une simple farce, une gouaillerie énorme. L’existence de la pie ne vous présentera qu’une série de ces bons tours malicieusement préparés. La comédie, la comédie grotesque de tout ce qui l’entoure, voilà, le bonheur de la pie, au demeurant bonne fille, malgré ses bavardages et ses commérages, ayant pour l’homme grande sympathie ; mais gardons-nous de dire sympathie et respect.

    La pie ne respecte rien ; les ridicules de l’homme sont d’ailleurs trop visibles pour qu’à son endroit elle ne s’en donne pas à cœur joie, volontiers elle entrera dans sa familiarité, mais à la condition de lui rire au nez même en cage.

    La laissons-nous libre au jardin ou dans la maison, dès le premier moment elle n’y sera pas seulement libre, elle y sera maîtresse. Eussiez-vous vingt chiens et vingt chats, vous les verrez tous endurer ses agaceries, elle leur fera jouer avec elle les comédies les plus drôles. Vous-même serez contraint d’y prendre votre rôle qui sera souvent celui de victime cocasse ; mais loin de vous en plaindre vous aurez plaisir à ses farces, à ses inventions continuelles, à ses folies, car il y a dans sa cervelle trop active un élément fou ; heureusement, elle semble elle-même ne pas se prendre au sérieux.

    Son plumage blanc et noir, mais d’un noir aux reflets superbes où semblent percer le bleu, le rouge, le vert, cette queue longue, effilée, raide et dressée en l’air, ces attitudes singulières, mal d’aplomb, toujours remuantes, cet éternel besoin de voir, de chercher, d’espionner les personnels, de déplacer, emporter et cacher les objets, évidemment pour faire niche, font de la pie une créature à part. Elle a été dans le monde des oiseaux ce qu’a été le renard parmi les mammifères. Elle a empêché qu’on ne crut au manque total d’intelligence chez les animaux ; on a même observé depuis longtemps que la pie sait compter.

    Dès leurs premières plumes les petits piaux reçoivent de père et mère des leçons d’arithmétique : on leur apprend à compter jusqu’à cinq.

    C’est ici (comme chez le renard), c’est dans l’éducation des petits que la pie a vraiment son beau côté. Pour abriter, nourrir, soigner, éduquer la nichée, nul oiseau ne la surpasse. Sa vie en famille est admirable : concorde, amitié, gaieté, bombance, entretiens joyeux et instructifs, c’est plaisir que d’observer tout cela, même de loin, même en entendant que l’on apprend aux piaux à se moquer du monsieur qui de là-bas regarde.

    Eh bien ! n’ai-je pas raison de me refuser à parler d’un oiseau si difficile à peindre, si mobile, si divers, si madré, si comédien, dont la vie semble n’être que déguisement, imitation d’autrui et moquerie perpétuelle ? En parle qui voudra et qui saura ; moi, pour rien au monde, je n’en voudrais dire un mot et vous apprécierez et louerez, j’en suis certain, la prudence du vieux jardinier ignorant.

     

    Extrait du volume 2 "Les bêtes" :

    Cuisine & Jardins

    Cuisine & Jardins

     AU  JARDIN  DU  PERE  LABECHE
     Volume 1 : Les plantes - Volume 2 : Les bêtes

     Eugène Noël
        14.8 x 21 cm - 148 pages - (2 volumes)

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    Bains et jeux d'été au Crotoy à la Belle Epoque

     

    Le début des bains.

    Face à l’ensablement de son port, Le Crotoy semble tourner ses aspirations vers d’autres entreprises. L’usage des bains de mer, qui se généralise de plus en plus, et auquel toutes les localités voisines de la mer semblent vouloir prendre part, s’est aussi établi au Crotoy. Vers 1840, le sieur Fanthomme commença par construire sous la butte du moulin, et contre les anciennes murailles de la ville, un petit réduit en planches qu’il décora du titre d’établissement des bains Fanthomme. Des personnes des environs, puis d’Abbeville et d’Amiens, commencèrent par y venir. La plage, toute de sable fin, chauffée par le soleil, est douce, agréable aux pieds ; les vagues n’y ont point cette rudesse des bains en pleine côte qui convient aux constitutions vigoureuses ; elles ondulent ici plus mollement et conviennent particulièrement aux personnes faibles, aux jeunes femmes, aux enfants maladifs. Beaucoup, si ce n’est tous, y recouvrent la santé et les forces. Aussi le Crotoy est-il spécialement fréquenté par une clientèle de jeunes personnes et d’enfants. On avait même parlé d’y fonder un hôtel de convalescence pour la jeunesse ; une société de médecins de Paris s’était formée à cet effet, mais le projet paraît avoir été abandonné faute de fonds.

     

    Des régates pour les enfants.

    Les enfants étrangers se plaisent beaucoup au Crotoy parce que la plage de sable est convenable à leurs jeux ; à marée-basse ils courent avec les enfants du pays sur la grève ; ils se déchaussent, marchent pieds nus dans les petites mares d’eau laissées par la mer et dans lesquelles ils lancent de petits navires. Cet exercice, fait sous les yeux des parents, est très salutaire à la santé, et c’est sans doute à cette cause qu’il faut principalement attribuer le bon effet des bains de mer du Crotoy sur les enfants rachitiques et de mauvaise venue. Il a donné à MM. de Puyraimond fils l’idée d’établir au Crotoy des régates d’enfants. Chaque année, à un jour désigné à l’avance, chaque enfant se présente avec son petit navire, qu’il oriente à sa manière pour lui faire atteindre le plus près possible le but placé sur l’autre côté du chenal. Après le concours, les prix sont distribués, et Mme de Puyraimond console les moins heureux par des distributions de bonbons. Ce spectacle est très amusant et rempli d’intérêt.

     

    Extrait de : 

    Sites et monuments LA CÔTE PICARDE À LA BELLE ÉPOQUE

     

     Collectif

     
      15.8 x 24 cm - 132 pages avec plans, cartes postales anciennes

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    Troisième volume de la série « Les montagnes de France », rédigé et illustré par Gustave Fraipont, artiste lithographe (1849-1923), cet ouvrage nous invite à parcourir en tous sens le puissant massif de l’Auvergne tel qu’il se présentait vers 1900.

    Fin observateur, l’auteur nous peint avec bonheur et humour les paysages, les lieux, et les mœurs de cette région très pittoresque.

    Ouvrage illustré de 105 dessins.

     

    Récits de voyagesVOYAGE EN AUVERGNE EN 1900

     Gustave Fraipont


      15 x 21 cm - 252 pages, avec illustrations de l'auteur.

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  • La Somme dans sa traversée d'Abbeville

     

    La Somme s’invite dans Abbeville entre le chemin du Pâtis et le chemin des Canotiers, à proximité du lieu, une île-refuge sur la rive droite, où la ville naquit dans les temps préhistoriques. Puis elle se divise en deux bras à partir du pont de la femme nue : l’un est la vieille Somme qui continue tout droit pour franchir le barrage des Six-Moulins. L’autre bras, que les navigateurs doivent obligatoirement emprunter, tourne à gauche sous les ponts de la Femme nue et de la Portelette pour devenir le canal de Transit creusé en 1835. Le tracé de ce canal suit à peu près une partie des fossés des anciens remparts de la ville. L’écluse de ce canal a d’ailleurs été construite avec des grès de l’ancienne Porte Maillefeu. Ce dernier, le Maillefeu, était un petit affluent de la Somme qui entrait par cette porte dans la ville, pour rejoindre la Somme en aval du barrage des Six-Moulins. D’ailleurs, une des tours rondes de cette porte Maillefeu existe encore au n° 56 du boulevard de la Portelette qui est l’entrée de l’ancienne entreprise de robinetterie de luxe Margot, fermée en 2004. Le canal de Transit passe ensuite sous le pont de la Gare qui a la particularité d’avoir, à l’une de ses entrées, le monument dédié au chevalier de La Barre.[...]

    L’aménagement du canal de Transit fut un des derniers chantiers de la Somme canalisée. Dans un premier temps, en 1818, on avait seulement doté le pont-écluse de la Portelette d’un pertuis marinier, passage étroit permettant la circulation des péniches. Le percement du canal de Transit proprement dit ne fut réalisé que dans les années 1830, terminé en 1835, car le Génie imposait des contraintes qui ont retardé le choix du tracé. Quant à l’écluse située sur ce canal de Transit, entre le pont de la Gare d’une part, le Pont d’Hocquet et le pont chinois d’autre part, son sas principal fut réalisé en 1839. C’est dans les fouilles de ce chantier, parmi d’autres en divers lieux, que l’Abbevillois Jacques Boucher de Perthes découvrit au XIXe siècle des outils de silex qui lui permirent de prouver l’existence de l’homme antédiluvien : il est considéré comme l’un des fondateurs de la science préhistorique. A propos de la vieille Somme que nous avons quittée entre le chemin des Canotiers et le chemin du Pâtis, elle entre donc tout droit dans Abbeville, après être passée sous le pont de la Femme nue (pont des Prés), du nom d’une statue féminine allongée sur la rive gauche du fleuve et qui est censée représenter la Somme gallo-romaine appelée Samara. Elle laisse sur la droite le Centre hospitalier général, le plus important de Picardie maritime. [...]

    Après avoir dépassé le pont de la Femme nue, la vieille Somme parcourt encore une petite centaine de mètres pour arriver au barrage des Six-Moulins qui date de 1955. Les vannes-rouleaux ayant été fortement abîmées pendant la Seconde Guerre mondiale, un nouveau barrage fut reconstruit à l’emplacement de l’ancien pour profiter des fondations. Il est destiné à réguler le niveau d’eau et à l’évacuation des crues. [...]

    Quelques dizaines de mètres après ce barrage des Six-Moulins, la vieille Somme passe sous le pont de Talance : elle est en plein cœur de la Ville. La collégiale Saint-Vulfran, joyau du gothique flamboyant, aussi majestueuse qu’une cathédrale, n’est qu’à deux cents mètres sur la droite. [...]

     

    Extrait de :

    vallée de la Somme  BUCOLIQUE VALLÉE DE SOMME

        DE LA SOURCE DU FLEUVE A SON EMBOUCHURE

       
    Gérard Devismes    Format 20 x 29 cm - 118 pages avec photos, dessins N/B

       Pour en savoir plus sur ce livre...

     

     

     

     

     

     


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