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Une petite visite à Saint-Riquier
Saint-Riquier, l'Hôpital (XVIIe siècle)
La rue de l’Hôpital, aujourd’hui bien abaissée, aboutissait à Haimont-Porte par une montée très raide, après avoir dépassé l’hôtel du Petit-Cygne, habité autrefois par la famille Hourdel, alliée plus tard à celle du sculpteur célèbre, Phaff, et à celle des Dargnies. On côtoie à gauche l’Hôtel-Dieu qui date du XIIe siècle, et la ferme dont certaines parties remontent à la même époque. Puis, à la hauteur de la porte Haymont, derrière les propriétés Bréart et Dorion, on voit encore le monticule qui servait de base au moulin à vent, nécessaire dans toute ville forte pour nourrir les habitants en cas de siège. Aussi était-il établi sur la croupe la plus haute de la cité murée. Plus à droite, en descendant vers le chemin de Neuville, s’ouvre le quartier le plus populeux de la ville, où les rues se croisent et s’entrecoupent à angles plus ou moins aigus. Là on trouve plusieurs noms qui nous viennent évidemment du Moyen Age : la rue des Maréchaux, des Macheries (ou des bouchers), les rues du Cantroy et Montgorguet, qui évoquent l’idée soit d’une corporation, soit d’une grande famille qui avait là son château. Il n’y a pas jusqu’au nom tragique de rue à Flacon qui ne fasse allusion à l’acte héroïque de Becquétoile qui, à la tête des femmes de ce quartier, tint tête à l’ennemi, lui enleva un fanion et le mit en fuite, en jetant sur les assaillants des charbons embrasés, vulgairement appelés flacons dans ces temps reculés. Toute agitation guerrière n’a pas disparu de ce quartier, et nous y connaissons plus d’une citoyenne hardie à l’attaque, prompte à la riposte et capable d’imiter la vaillance de l’ancêtre fameuse.
On y trouve aussi la rue des Angles ou des Anglais. Pourtant ce serait trop se hasarder que d’affirmer, avec une tradition peu sûre, que ce nom remonterait à l’occupation de Saint-Riquier par les Anglais lors de la guerre de Cent Ans. Cette dénomination est beaucoup plus ancienne et existait déjà au XIIe siècle.
Peut-être remonterait-elle à l’exil de saint Thomas de Cantorbéry (1167 à 1170), comme le pense M. l’abbé Hénocque. On sait d’ailleurs que les parents et les amis du noble persécuté furent bannis au nombre de quatre cents au moins. Il ne serait pas étonnant qu’ils se fussent fixés alors à Saint-Riquier, ville frontière et capitale de la province maritime, cité relativement calme et sûre où ils pouvaient trouver un abri et un appui beaucoup mieux qu’à Abbeville qui sortait à peine de ses marais. On trouve d’ailleurs encore le nom de Becquet ou Beket en 1418, 1422 et 1495, allié dans Saint-Riquier à celui des de la Motte. Nous avons vu nous-mêmes, entre les mains de M. l’abbé Fricourt, un mouchoir taché de sang qu’on disait être un linge trempé dans le sang du martyr. Cette relique a été, croyons-nous, envoyée avec un peu trop de confiance à l’évêque de Cantorbéry qui n’a pas même envoyé un merci de gratitude élémentaire au généreux et imprudent donateur. Est-il téméraire de penser que cette relique, qui était une des richesses du trésor, aurait été offerte à l’église par les intimes du saint archevêque ?Extrait de :
HISTOIRE DE SAINT-RIQUIERErnest Prarond
14 x 21 cm - Reprint 432 pages
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