• L'alcoolisme dans la Somme vers 1900

    Quelques proverbes et dictons picards...

     

    Le facteur le plus favorisant de la petite délinquance est sans aucun doute l’alcoolisme. L’alcoolisme, on le sait, était un véritable fléau social dans la Somme, département qui, d’après L’Authie du 4 mai 1895, arrivait au deuxième rang en France (après la Seine-Inférieure) pour la consommation d’alcool par habitant : la consommation aurait été en 1894 de 46 litres de bière,15 litres de vin, 13 litres de cidre et 10 litres d’alcool par habitant (à noter qu’à la même époque la consommation d’alcool en France était de 4,3 litres par habitants). Plus de 40% des personnes comparaissant en correctionnelle sont catalogués comme étant des alcooliques. Il semble que le monde ouvrier était particulièrement touché, une indication nous est donné par Edouard Legenne à propos d’un café proche d’une usine à Harbonnières qui employait 150 ouvriers en 1900 où « Il se consommait chaque jour un tonnelet de 35 litres de fil en deux ».
    Tous les types de délinquances ne sont pas au même degré concomitants de l’alcoolisme : ce sont surtout les délits de violences (coups et blessures volontaires, bris de clôture) et les insultes et rébellion à l’égard de la force publique qui sont concernés. Ainsi en Décembre 1895 un marchand de vaches de Quesnoy sous Airaines est condamné à 50 F d’amende pour outrage à maire et à garde champêtre et à 5 F d’amende pour ivresse. Autre exemple, une Amiénoise de 48 ans est condamnée à la même époque à 2 mois de prison pour ivresse en récidive, outrage à la pudeur et bris de carreaux. Le scandale atteignait son comble quand des prévenus se présentaient en état d’ivresse au tribunal : ce fut le cas d’un terrassier d’Amiens accusé du vol de 4 peaux de lapins, le manque de respect dû à l’institution qu’exprimait l’état de l’accusé n’incitèrent pas les juges à la clémence : il fut donc condamné pour ce délit à 6 jours de prison, 16 F d’amende et à 5 F pour ivresse.
    Pour avoir une idée plus précise de l’importance de l’alcoolisme, il faut aussi prendre en compte les procès d’ivresse sur la voie publique dressés par la police ou la gendarmerie : ainsi, uniquement pour la journée du 15 janvier 1895, 10 contraventions pour ivresse sont dressées pour la seule ville d’Amiens et il ne se passe guère de jour sans que plusieurs contraventions pour le même motif ne soient relevées dans les commissariats de la ville. Notons bien sûr qu’à cette époque, où il n’existait aucun moyen scientifique de mesurer l’alcoolémie, il fallait que l’ivresse soit manifeste pour qu’elle puisse être repérée et éventuellement sanctionnée.
    Si l’ivresse sur la voie et les lieux publics est un délit elle n’est passible que d’une contravention relativement modeste (5 F en général), et les juges se montrent souvent plutôt bienveillants, ils ne manifestent de la sévérité qu’envers les multirécidivistes, tel ce journalier d’Amiens con-damné en décembre 1895 à 1 mois de prison. D’ailleurs il faut noter que l’état d’ivresse n’est pas souvent une cause de comparution en correctionnelle, il n’est presque toujours évoqué qu’en accompagnement d’autre délits dont il est souvent l’une des causes, sinon la cause principale.

     

    Extrait de :

    Picardie Belle Epoque DÉLINQUANTS ET CRIMINELS

     DANS LA PICARDIE DE LA BELLE ÉPOQUE

      Pierre Desbureaux 
     
      14 x 21 cm - 122 pages - Essai

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