• Au potager en 1900 : sarclages et binages

     

    Le sarclage est une des opérations les plus importantes, mais aussi les plus négligées dans le potager ; il consiste à enlever les mauvaises herbes des semis, à la main, lorsque ceux-ci, faits à la volée, sont très jeunes et très serrés, et avec le sarcloir lorsqu’ils ont été faits en lignes.

    En principe, il ne doit jamais exister de mauvaises herbes ni de plantes étrangères dans les semis destinés au repiquage, ni dans les plantes ensemencées à la volée ou en lignes. Les mauvaises herbes sont toujours beaucoup plus vigoureuses que les plantes cultivées ; de plus, elles poussent en quantité prodigieuse, par conséquent elles vivent au détriment des plantes cultivées, non seulement en absorbant l’engrais qui leur était destiné, mais encore en les étouffant avec leurs feuilles et leurs racines.
    Dès que les semis sont bien levés et que les mauvaises herbes apparaissent, on fait un premier sarclage à la main, c’est-à-dire que l’on arrache une à une les mauvaises herbes. Il faut bien se garder de les laisser devenir plus fortes que les plantes semées, sous prétexte que l’herbe est trop petite ou qu’il fait trop sec.
    On tient le sarcloir de la main droite ; avec la pointe on pénètre très avant dans les lignes pour éclaircir les parties trop drues, et avec les côtés on tranche rapidement, entre deux terres, les racines des herbes placées entre les lignes, pendant que la main gauche enlève les herbes coupées, et arrache celles qui ont échappé au sarcloir.
    Il y a avantage à détruire les mauvaises herbes, et éclaircir avec le sarcloir : le binage, opéré très superficiellement avec cet instrument, ameublit la terre, la rend perméable et rechausse les plantes. Il est bien rare de donner un troisième sarclage quand les deux premiers ont été bien exécutés, et surtout faits à temps, car alors le semis s’est assez fortifié pour envahir complètement le sol, et il étouffe à son tour les mauvaises herbes. Les sarclages sont peu dispendieux ; ce sont des femmes qui les exécutent la plupart du temps. Ils avancent considérablement la récolte, et en augmentent énormément la qualité et la quantité.

    Au potager en 1900 : sarclages et binages

     

     

     

     

    Le binage est une des opérations les plus importantes, et celle qu’il est le plus difficile d’obtenir des praticiens. Il contribue, à lui seul, aussi puissamment au succès des cultures que les labours et les arrosements tout à la fois.
    On considère généralement le binage comme une opération uniquement destinée à détruire les mauvaises herbes ; c’est une erreur profonde. Le binage rend le sol perméable à l’air, et y maintient l’humidité. Par conséquent, il agit énergiquement sur la végétation, en facilitant la décomposition des engrais, et en accélérant l’ascension de la sève ; c’est là son principal but. Ce binage est aussi efficace qu’un bon labour sur la végétation ; la destruction des herbes n’est que secondaire.
    Tout ce qui n’est pas paillé dans le potager doit être très fréquemment biné, surtout après les arrosements qui battent la terre et forment à la surface une croûte dure et sèche.
    Cette croûte superficielle est très nuisible à la végétation, surtout dans les sols un peu compacts. Elle empêche, d’une part, l’air de pénétrer, et s’oppose par conséquent à la décomposition des engrais ; de l’autre, cette croûte dure et desséchée arrêtant l’évaporation. Il n’y a plus d’humidité à la surface. Aussitôt la croûte superficielle brisée, l’air et les rosées pénètrent le sol, et, l’évaporation se rétablissant, l’humidité du fond remonte à la surface par reflet de la capillarité, et apporte aux racines la fraîcheur dont elles étaient privées.
    Il est impossible de déterminer le nombre des binages et l’époque à laquelle il faut les donner. Cela est subordonné à la nature du sol, à sa consistance, et aussi à la température. Il est évident qu’il faut biner plus souvent dans un sol argileux que dans un sol léger ; la terre s’y croûte plus vite, et sa cohésion est telle qu’elle se fend pendant la sécheresse.
    Les binages doivent être plus fréquents dans tous les sols, quand la température est très élevée un bon binage est plus efficace qu’un mauvais arrosement, surtout s’il est mal appliqué. Une petite quantité d’eau jetée brusquement bat la terre sans la mouiller, et ne fait qu’augmenter l’épaisseur de la croûte superficielle.
    Les binages sont indispensables après les arrosements, car, quelque bien administrés qu’ils soient, ils déterminent toujours la formation d’une croûte à la surface du sol, et il est de toute nécessité de la briser pour que les arrosages soient fructueux.
    On pratique le binage avec plusieurs instruments.

    Au potager en 1900 : sarclages et binages
    La binette est très expéditive, mais c’est un outil imparfait pour le potager ; il ne pénètre pas assez profondément et n’ameublit pas suffisamment le sol. L’emploi de la binette dans le potager doit se restreindre aux pommes de terre et aux cultures très éloignées et rarement arrosées.
    Nous emploierons presque toujours la cerfouette, outil bien plus énergique, et opérant un travail plus parfait.
    La grande cerfouette nous rendra les plus grands services dans les planches de choux, les salades, etc. La lame pénètre très facilement, remue la terre à une grande profondeur et détruit toutes les mauvaises herbes. Avec les dents, on ameublit très profondément le sol autour des racines, sans les endommager. La façon opérée, un coup de crochet donné vivement ramène toutes les herbes à la surface, où il est facile de les enlever, et unit parfaitement la planche.

    Au potager en 1900 : sarclages et binages

     

     

     

     


    La petite cerfouette rend les plus grands services dans les pépinières de légumes. C’est le seul outil à employer. La lame effectue un binage énergique entre les lignes, le crochet brise les mottes, ramène l’herbe à la surface, et rechausse les plantes. La petite cerfouette peut être employée avec le plus grand avantage pour biner, pendant les grandes sécheresses, les semis en lignes de carottes, oignons, etc. Le sol est remué profondément avec la lame et avec le crochet, sans endommager les racines, et la récolte gagne énormément à cette opération.
    Enfin, si, comme cela arrive dans les jardins bien cultivés, il n’y a pas de mauvaises herbes, et que l’année ne soit pas trop sèche, on accélérera très sensiblement la végétation en donnant de temps en temps un hersage dans les planches avec la petite fourche crochue. Le sol est fouillé à 8 ou 10 centimètres de profondeur l’air y pénètre facilement, décompose les engrais, et la végétation y gagne beaucoup.
    Je ne saurais trop insister sur la nécessité des binages, et j’insiste d’autant plus qu’il existe un préjugé très enraciné chez certains praticiens ; ils ne veulent pas biner par la sécheresse, et sont convaincus que le binage fera sécher la terre davantage encore. Le contraire a lieu : le binage donne de la fraîcheur au sol. Un binage énergique est plus efficace qu’un arrosement incomplet. Si vous manquez d’eau, binez souvent et profondément : vous sauverez vos plantes. Qui bine arrose ! 

     

    Extrait de :

      Cuisine & JardinsLE POTAGER MODERNE EN 1900

    Volume 1 : Création & conduite

    14.8 x 21 cm - 114 pages - Illustrations

      Vincent-Alfred Gressent

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