• La fenaison dans le Ponthieu (Bouquemaison) vers 1930

     

    La fenaison dans le Ponthieu (Bouquemaison) vers 1930

     

    « Faner c’est retourner l’herbe dans un pré en batifolant » écrivait un jour Mme de Sévigné après qu’elle eut pendant quelques courts instants sans doute et par désœuvrement manié un quelconque râteau en guise de distraction. Ces propos légers sont bien loin de la réalité car “ faire les foins ” à l’époque qui nous occupe était tout autre chose. Les trèfles, luzerne et sainfoin étant à maturité de floraison (souvent début juin) étaient fauchés au “ passe-partout ”. Cette faucheuse était équipée d’une barre horizontale traînant au niveau du sol et servant de guide à une scie constituée de dents triangulaires aiguisée sur deux faces et animée d’un mouvement latéral alternatif de va-et-vient par l’intermédiaire d’une roue motrice tandis qu’un tambour pivotant horizontalement chassait à l’arrière le végétal qui, guidé par des rabats, se déposait en “ javelle ”. Cette machine était attelée de deux chevaux, son conducteur était assis, fait assez rare ne concernant que les faucheuses, les autres instruments de culture étant le plus généralement suivis à pied par leur conducteur. Selon l’abondance du fourrage le tambour se révélait parfois insuffisant à produire son office, ce qui entraînait un bourrage qui nécessitait la présence à l’arrière d’un compagnon qui suivait la machine et le cas échéant, dégageait la coupe à l’aide d’une courte perche munie d’un crochet.

    Après quelques jours d’exposition au soleil le foin était ramassé à la main pour être bottelé (1). Le ramassage manuel du foin était une opération pénible : d’abord elle nécessitait d’être courbé continuellement en traînant la main au niveau du sol jusqu’à la formation d’une botte entre les deux bras. C’était donc une grande fatigue des reins, de plus les mains sans protection étaient mises bien souvent en contact avec les chardons séchés aux piquants bien acérés ; mais aussi et surtout cette activité se déroulait bien souvent sous un soleil de plomb alors que la poussière montait du sol à mesure que l’on remuait le foin. Par les années de réelle canicule, pour éviter la chaleur, il n’était pas rare de procéder au ramassage très tôt au lever du soleil (à la fraîche)... Les bottes formées étaient liées soit avec des liens de paille de seigle préparés à l’avance ou avec des ficelles de faucheuse-lieuse récupérées lors des battages et apprêtées pour cet usage.

    Restait à charrier cette récolte pour la mettre à l’abri. Cela avait lieu le plus tôt possible compte tenu des possibilités de pluie ou d’orage. Toutes ces bottes étaient donc ramenées à la ferme et engrangées. Si leur maniement n’était pas éprouvant vu leur faible poids cette mise en tas sous les tuiles des granges, toujours par forte chaleur et au milieu de la poussière dégagée qui collait aux corps en sueur, constituait un travail pénible et désagréable.

    Selon les années, il pouvait y avoir une deuxième récolte.

    NOTE :

    (1) Bien qu’il existait déjà un râteau faneur attelé d’un cheval permettant le ramassage de plusieurs javelles à la fois mais dont l’emploi était bien loin d’être généralisé et qui ne faisait que rassembler le foin sans pour autant former la botte.

     

    Extrait de :

     

     Villes & Villages  BOUQUEMAISON, UN VILLAGE PICARD
    de 1919 à 1939

     Pierre Duséval

      15.5 x 22 cm - 302 pages avec photos d'époque
     
     
     
     
     
     
     
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