• Une traversée de la baie de Somme en 1905

     

    Une traversée de la baie de Somme en 1905

     

    Les dames ont relevé leurs jupes.

    Quand le passeur dit le « passager du Crotoy » a gagné l’autre rive, on s’engage sur le sable, grenu comme une peau de chagrin, mais moins sec que celui du Sahara. Les personnes prudentes vous conseilleront de prendre un guide, qui ne saurait, après tout, que porter vos paquets et vous conduire en ligne droite.

    Les dames, nos compagnes de route bien avisées, ont relevé leurs jupes jusqu’à mi-jambe à l’instar des pêcheuses du pays et ne craignent pas de montrer leurs mollets. Honni soit qui mal y pense ! Elles tiennent leurs bottines à la main, ce qui ne laisse pas de les embarrasser, car elles se sont munies aussi des filets et petits engins nécessaires à la pêche.

    Mauvais début, la marche n’est pas si aisée que nous le disaient les bonnes gens du Crotoy. Le sol est solide, mais souvent parsemé de débris de coquillages pulvérisés. Le sable devient parfois mouvant et s’enfonce, par endroits, sous les pieds qu’il faut se garder de trop appuyer. Nous courons, nous sautons pour éviter des « baches » d’eau peu profondes où les mollusques broutent sur de petites algues. Et ce sont de petits cris de nos compagnes effarouchées, de fausses alertes : « Gare au flot ! La mer monte ! »

    Mais bientôt on a repris son équilibre, on s’est convaincu de l’inanité du danger. Un beau soleil dore la baie et miroite sur les flaques d’eau de la vaste esplanade. C’est un plaisir de plonger les pieds dans l’eau l’eau des petites mares. Cela procure comme une tiède caresse. On respire l’air salin, on savoure la joie de vivre, la volupté de ne penser à rien.

    Dans la petite caravane, en marche vers Saint-Valery, l’un porte ses souliers et ses chaussettes attachés au bout de sa canne ; un autre, simplement chaussé Saint-Valery-sur-Somme, l’Avenue de la République et la Rue Jean Acloque d’espadrilles, a laissé à l’hôtel ses chaussures incommodes. Une dame provoque de légers sourires, avec des jupes flottantes qui se ballonnent au moindre vent et qu’elle s’évertue soit à rabattre, soit à attacher au moyen d’épingles.

    Tous ces touristes, trop parisiens, comptent prendre une part active à la pêche qui va s’organiser et qui sera l’accompagnement de cette promenade, où le plaisir de traverser cette immense étendue de sable se double d’un divertissement hygiénique, à la portée des gens du monde. Et le cadre est approprié au tableau.

    par Paul Eudel

    Extraits de :

     

     Une traversée de la baie de Somme en 1905 LA CÔTE PICARDE À LA BELLE ÉPOQUE

     

     Collectif

     
      15.8 x 24 cm - 132 pages avec plans, cartes postales anciennes

      Pour en savoir plus sur ce livre...

     

      

     

    le crotoy
     
    LE CROTOY À LA BELLE ÉPOQUE 
      
     Paul Eudel 
     
     14.5 x 21 cm -   110 pages avec cartes postales et illustrations
    « Saint-Quentin, une très ancienne ville de l'AisnePublicité pour un été à Onival en 1895 »

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