• Petite histoire du hâble d’Ault

    Petite histoire du Hâble d’Ault



    Entre Cayeux et le bourg d’Ault s’étend parallèlement au rivage de la Manche, sur une distance d’environ quatre kilomètres, un étang littoral, beaucoup plus long que large, séparé de la mer par un épais cordon de sables et de galets, et connu sous la dénomination très ancienne de hâble d’Ault.
    On l’appelait primitivement « havre » ou « hâble » (habellum) d’Hautebut, du nom d’un village dépendant actuellement du canton d’Ault, près de la route départementale d’Eu à St-Valery, et auprès duquel la mer arrivait alors à marée haute. Il y avait en cet endroit un port très fréquenté, puisque, dans un accord conclu en 1583, entre le seigneur de St-Valery et l’abbaye de cette ville, il est question de « navires qui arrivent de la mer au port de hâble de Autebue et de l’ancrage de ces navires ». Les droits d’ancrage dans le port du hâble étaient dévolus à l’abbaye.
    L’entrée du hâble se trouvait, à cette époque, très près du bourg d’Ault, et servait de refuge aux bateaux des pêcheurs de cette localité. Cette entrée s’est déplacée progressivement vers le Nord, jusqu’au jour où le hâble d’Ault (nom que prit et qu’à conservé le hâble d’Hautebut) complètement séparé de la mer par le cordon littoral d’alluvions, finit par constituer un lac sans issue.
    Au début du XVIIIe siècle, les galets commencèrent à obstruer le chenal du hâble. En 1703, un bateau du bourg d’Ault s’y échoua ; des accidents de ce genre s’étant fréquemment renouvelés, les pêcheurs s’en servirent de moins en moins.
    En 1750, les seigneurs terriens du voisinage et les habitants des villages des Bas-Champs obtinrent de la généralité d’Amiens l’autorisation de fermer complètement le hâble d’Ault, pour soustraire leurs terres aux ravages que la mer y causait aux marées d’équinoxe, et aussi pour gagner quelques arpents de sol. Cette année même fut exécuté un aqueduc artificiel d’écoulement, que la mer détruisit presque aussitôt.
    Une deuxième digue ou barrement fut élevée en 1752.
    Enfin, après plusieurs autres tentatives infructueuses d’endiguement, fut élevé en 1766, à l’aide de 1500 hommes de corvée, le Grand Barrement, encore facile à reconnaître aujourd’hui. Néanmoins, ce n’est qu’en 1772, époque de l’ouverture du noc ou canal de l’Enviette, que la communication du hâble avec la mer fut définitivement bouchée par un large banc de galets.
    Ce noc de l’Enviette est un canal de 7 000 m. de longueur, non navigable, par lequel les eaux des Bas-Champs de Cayeux se déversent dans le port du Hourdel.
    Vers la fin du règne de Louis XIV, le ministre Vauban eut l’idée de créer un port important au hâble d’Ault. Cette idée fut reprise par Lamblardie à la fin du XVIIIe siècle. Napoléon Ier, lorsqu’il visita les côtes de la Manche, à l’époque de l’établissement du camp de Boulogne, jeta aussi les yeux sur le hâble d’Ault pour la fondation d’un nouveau port.
    Aujourd’hui encore, beaucoup de bons esprits seraient d’avis, étant donné l’ensablement continue de la baie de Somme, de détourner le canal d’Abbeville à St-Valery, à partir de Pinchefalise, par la vallée de l’Amboise, ou après le cap Hornu, à travers les Bas-Champs de Cayeux, pour aboutir au hâble, qu’il serait facile de remettre en communication avec la mer, et où il serait possible d’établir un port en eau profonde.
    Actuellement, le hâble d’Ault est un vaste étang d’eau douce séparé de la mer par un cordon littoral de sable et de galets qui a atteint environ 300 mètres de largeur. Sa longueur totale, du Nord au Sud, est d’à peu près trois kilomètres et demi. Son pourtour est extrêmement sinueux et capricieusement découpé en baies des plus pittoresques. Ses bords sont ourlés d’une vigoureuse végétation de joncs et de roseaux.
    Le hâble est peuplé de fort beaux poissons. D’autre part, cette vaste nappe d’eau douce exerce une grande attraction sur toutes les variétés d’oiseaux aquatiques qui habitent le littoral de la Manche, ou qui s’y trouvent de passage à des époques régulières.

    Source : Anatole Mopin,
    Histoire de Cayeux-sur-Mer, 1904
     

    A lire aussi, un autre article très intéressant sur "Le renouvellement littoral , de gré ou de force"  (décembre 2018) par Grégory MORISSEAU, Ingénieur paysagiste, docteur en Géographie, Agence Chorème dans le magazine de l'ANABF

     

    Extrait de : 

    cayeux sur mer
     
    HISTOIRE DE CAYEUX-SUR-MER
     
    Anatole Mopin 
     
    15 x 21 cm - 254 pages
     

     

     

     

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