• Grand Jules : présentation

     

         "Grand Jules" était un être atypique, c'est aussi un "récit par nouvelles" écrit par Philippe Crognier et publié en 2001.

     

         Voici son portrait :

         Grand Jules arbore son habit de tous les jours : béret posé de guingois sur sa bouille ronde, veste d’ouvrier entièrement ouverte sur une chemise à carreaux, pantalon qui baille, serré aux hanches à la va-vite par une ceinture de cuir tombante, chaussures de toile pour travaux d’été et, entre le pantalon et la chemise, les débordements disgracieux d’un bandage de flanelle. Sa décontraction n’est qu’apparente, au Grand Jules. En réalité il pose. Son bras gauche forme un angle droit ; sa main, refermée, repose contre son côté, un peu comme le font ces toreros, lorsqu’ils  minaudent gracieusement dans l’arène pour mieux séduire et la bête à terrasser et les amateurs de corrida à satisfaire. Au bout de sa main droite, ramenée contre sa bedaine naissante, fume une cigarette. Il a l’air amusé. Il est jeune et il est presque beau.  A sa gauche, il y a Clorinthe, sa femme, et Pâquerette, sa fille.
          La photo n’a d’autre couleur que le jaunâtre dont elle est enduite et qui, fatalement, finira un jour ou l’autre par tout engloutir. Pourtant, on devine le vert des plantes alignées en rang d’oignons juste derrière le Grand Jules, le pourpre des pots d’argile, le bleu nuit de son pantalon à Jules, de sa veste et de son béret, l’azur de ses yeux et, tout autour, la blondeur du soleil qui couvre l’événement.
          Les photographies ont cela de terrible, c’est qu’elles raniment, en un éclair, des souvenirs dont on espérait bien être débarrassé. Il suffit donc qu’un rectangle de papier glacé, marqué par quelques nuances de tons, glisse malencontreusement de l’album, du cahier ou du livre de recettes où il dormait tranquillement, pour que, sans prévenir, un nuage d’émotion vous étreigne… jusqu’à vous faire mal.

         Jules est mort, il y a maintenant une quinzaine d’années. Sa disparition en a surpris plus d’un. A commencer par ceux qui avaient suivi de près les combats réguliers et sans merci opposant cette force de la nature à la croqueuse de vie. Parce qu’il repoussait sans cesse au lendemain la perspective de mourir aujourd’hui, on avait fini par prendre Grand Jules pour un immortel. L’histoire montre que l’on s’est trompé. La mort lui est tombée dessus alors qu’il dormait seul, très affaibli, au beau milieu d’une belle nuit de printemps. Il a lutté avec ce qui lui restait d’énergie et probablement avec l’énergie du désespoir. La mort, elle, n’a pas respecté le gong qui venait de sonner. Elle a serré et serré encore. Elle a vaincu avec rage celui qu’elle convoitait depuis si longtemps. On ne défie pas éternellement la mort, semblait-elle avoir laissé comme message une fois son forfait accompli. Il n’empêche que Grand Jules lui avait rabattu son caquet plus d’une fois à la mort et que, ce faisant, il avait montré qu’avec force et ténacité, on pouvait presque venir à bout des épreuves les plus difficiles de la vie.  

         A suivre...
     
     

     

    « A savoir concernant les sites Amazon.com et Chapitre.com"L'Equipée sauvage" de Grand Jules »

  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment



    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :